« Gender Trouble » versus Hétérosexisme
L'identité sexuelle n'est
intrinsèquement liée à aucune de ces dimensions et une dysphorie* du genre n'implique pas
forcément un « trouble » de l'identité sexuelle.
Quant à la division binaire et la
hiérarchie qu'elle suppose, il n'est plus à prouver qu'on la trouve autant dans
le binôme homme / femme que dans le binôme hétéro / homo.
Comme l'explique Louis Georges
Tin « l'hétérosexisme semble
garantir à l'individu masculin qui y consent la maîtrise du monde social, à
condition qu'il accepte de prouver dès son plus jeune age, et pendant toute sa
vie, démonstration exigeante et épuisante, comme l'a bien montré Elisabeth
Badinter, qu'il n'est ni un bébé, ni une fille, ni enfin un "pédé". »[1]
D'ailleurs, pour preuve de
l'anormalité de tout ce qui n'est pas hétérosexualité, hétéronormalité et hétéronormativité,
longtemps seuls ont été nommés sous diverses appellations les homosexuels en
opposition aux « normaux » hétérosexuels qui n’avaient eux, pas
besoin de désignation spéciale. Il en va de même de l'appellation transgenre,
qui fut longtemps opposée à normal, jusqu'à ce que l'on crée la dénomination
cisgenre*.
/.../
L'essentiel est en tout cas de
comprendre que sexe, genre et orientation sexuelle ne sont pas forcément liés
entre eux et peuvent fortement diverger mais forment néanmoins tous ensemble
l’identité sexuelle.
En effet, l’identité sexuelle est
la somme de toutes ces données, elle comprend sexe biologique, genre et
orientation sexuelle. On peut être cisgenre et hétérosexuel/le, cisgenre et
homosexuel/le, cisgenre et bisexuel/le, transgenre et hétérosexuel/le,
transgenre et homosexuel/le, transgenre et bisexuel/le, et dans tous ces
cas-là, le sens qu'on donne à ces termes dépend plus de la façon dont on se
perçoit soi-même que de critères scientifiquement vérifiables.
Comment qualifier une personne
transgenre de sexe mâle, de genre féminin, et sexuellement attirée par les
femmes ? Son corps est mâle : est-elle donc un homme hétérosexuel ?
/.../
Rien n'étant défini en lien,
l'identification d'un genre ne peut pas permettre de supposer l'identité
sexuelle, pourtant, la caricature homosexuelle est complètement fondée dans ce
moule, et longtemps les homosexuels n'ont été représentés que par la caricature,
l'exacerbation du genre opposé au sexe.
La « Zaza Napoli » de
Michel Serrault dans La Cage
aux Folles [2]
en est la démonstration la plus marquante, l'homosexuel est ici caricaturé par une
personne de sexe biologique homme et de genre féminin.
Une catégorisation caricaturale
dont on peut se demander si elle n’est pas surtout rassurante pour l’homme-blanc-straight*… On pourra s'interroger
aussi sur la nécessité selon les époques et/ou le sexe de s'accrocher à cette
dysphorie ou non du genre...
La plupart des clichés sur l'homosexualité étant engendrée
par cet amalgame et cette confusion faite entre les trois notions de sexe,
genre et orientation sexuelle, il m’apparaissait important d’y consacrer une
partie de ce mémoire.
[1] TIN (LG), 2003, Hétérosexisme, dans L-G. Tin (dir.), Dictionnaire de l'homophobie, Paris, Presses Universitaires de France, 451 p. p.209 – 210
[2]